L’année dernière, la Commission européenne a publié la version finale des nouvelles règles d’adéquation de la MiFID II[1]. Avec cette nouvelle réglementation, les prestataires de services d’investissement sont tenus de prendre en considération les préférences environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) de leurs clients lorsqu’ils prennent des décisions d’investissement. Si cette mesure permettra aux investisseurs de faire un choix plus objectif et plus durable, elle pose certains défis au secteur des services financiers. Chaque institution financière devra développer ou réévaluer sa propre stratégie ESG, et son offre de produits d’investissement devra être élargie ou au moins modifiée.

La nouvelle réglementation

Les règles actuelles de la MiFID II exigent que ceux qui fournissent des conseils en investissement et gèrent des portefeuilles obtiennent des informations sur les objectifs financiers des clients, leur profil de risque, ainsi que leurs connaissances et leur expérience en matière de produits d’investissement. Les modifications apportées aux règles d’adéquation de la MiFID II garantissent que les préférences ESG des investisseurs sont également prises en compte dans les processus de conseil en investissement et de gestion de portefeuille.

Ces exigences ESG doivent être prises en compte par les entreprises d’investissement auprès de leurs clients, tout en les intégrant dans leurs exigences en matière de gouvernance des produits. Les modifications apportées à la MiFID II en matière d’ESG ont un impact important sur les banques et les entreprises d’investissement qui fabriquent et distribuent des produits d’investissement. Les institutions financières ont jusqu’au2 août 2022 pour se conformer à ces nouvelles réglementations ESG.

Les prestataires de services d’investissement sont confrontés à plusieurs défis pour intégrer ces nouvelles exigences ESG.

Défi 1 – Intégrer les nouvelles exigences

Les distributeurs et les prestataires de services d’investissement seront confrontés à d’importants défis pour intégrer ces exigences ESG dans leurs processus actuels, leur cadre réglementaire et leur offre de produits.

Ils devront analyser la manière dont ils souhaitent sensibiliser le client à l’importance de l’investissement durable. Le terme ayant une signification différente pour chaque investisseur, il sera important de recueillir les informations correctes et pertinentes auprès du client.

Ils devront également réfléchir à la manière d’obtenir les informations pertinentes du client (c’est-à-dire les questions à inclure dans le questionnaire MiFID), à la manière de stocker ces nouvelles informations et à la manière de les rendre opérationnelles dans les processus d’investissement concernés. Tout cela implique des changements importants dans le profil des investisseurs par client, tandis que les institutions financières doivent également décider quels produits elles offriront aux clients qui souhaitent investir dans des entreprises ayant des notations ESG élevées. Actuellement, la plupart des banques ne proposent pas de produits ESG spécifiques. Certaines banques proposent déjà des produits ISR (investissement socialement responsable), mais ces fonds ne couvrent pas l’ensemble des besoins, car l’investissement ESG prend en compte un ensemble plus large de questions de diligence raisonnable. Les offres actuelles des différentes banques ne sont pas encore alignées sur ces préférences.

Défi 2 – Délai strict

Il existe un décalage évident entre l’échéance fixée pour l’ESG dans la MiFID et les autres réglementations liées à la finance durable, ce qui se traduit par un manque de données de marché permettant aux distributeurs de produits d’investissement de remplir leurs obligations au titre de l’ESG dans la MiFID.

Les distributeurs de produits d’investissement sont confrontés à la tâche difficile de conseiller leurs clients en fonction de leurs préférences en matière de durabilité, sans disposer des outils et des données nécessaires pour déterminer si leur offre répond aux préférences du client en matière d’ESG. Alors qu’elles doivent se conformer à la directive d’ici le début du mois d’août 2022, les entreprises ne partagent pas encore suffisamment d’informations sur leur politique de développement durable. Il en résulte un décalage entre les réglementations imposées et les informations actuellement disponibles pour les distributeurs et les prestataires de services d’investissement. La résolution de ce décalage prendra un certain temps, ce qui rend l’échéance encore plus difficile à respecter. Nombre d’entre eux estiment que le délai est trop strict et demanderont qu’il soit prolongé jusqu’au début de l’année 2023. D’un point de vue politique et réglementaire, il semble qu’il y ait peu de réponse à cette demande de report à ce stade.

Défi 3 – Questions relatives aux données

Comme nous l’avons déjà mentionné, un troisième problème est lié au (manque de) données. Les prestataires de services d’investissement sont confrontés à des données brutes manquantes ou insuffisantes pour analyser l’adéquation des produits d’investissement actuels aux critères ESG. De plus en plus d’entreprises fournissent elles-mêmes des données ESG dans leurs rapports annuels, mais comme il ne s’agit pas d’une obligation, toutes les entreprises ne le font pas, ce qui rend encore plus difficile la comparaison de ces entreprises sur la base des critères ESG. Il n’existe pas non plus de lignes directrices universelles sur la manière de différencier les produits d’investissement adaptés aux critères ESG de ceux qui ne le sont pas. Plusieurs agences externes (par exemple, Bloomberg et Morningstar) sont spécialisées dans l’analyse de ces données, mais en raison de l’absence de cadre réglementaire, elles utilisent toutes un système d’évaluation différent. Cela pourrait entraîner un risque d’écoblanchiment, lorsque l’équipe chargée du développement des produits exagère les références ESG de l’entreprise ou des produits.

Conclusion

Avec la nouvelle réglementation ESG MiFID II, la Commission européenne a envoyé un signal clair sur l’importance de la durabilité à l’avenir. Toutefois, cette nouvelle réglementation ESG s’accompagne de plusieurs défis. S’il sera probablement difficile de s’y conformer, le champ d’application de la réglementation constituera une avancée pour le secteur à l’échelle mondiale. Bien que toutes les institutions financières soient confrontées aux mêmes problèmes, elles trouveront des solutions différentes pour mettre en œuvre ces exigences ESG dans leurs propres processus et offres de produits. Le délai de mise en conformité se rapprochant de plus en plus, les institutions financières devront établir des priorités et consacrer du temps, des ressources et de l’expertise pour garantir le plus haut degré de conformité possible dans ces circonstances difficiles. Une expertise suffisante en matière de durabilité, de réglementation et de gestion des données jouera un rôle crucial à cet égard.

Dynafin

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