Tous les économistes s’accordent désormais sur les turbulences économiques qui nous attendent, dès aujourd’hui et plus encore une fois la pandémie de grippe aviaire 19 terminée. L’assureur-crédit Euler Hermes prévoit au moins 23 000 faillites en Belgique jusqu’à la fin de l’année prochaine. Cela représente une augmentation de près de 10 % par rapport à la situation d’avant la crise. À titre de comparaison, sur l’ensemble de l’année 2019, un peu moins de 12 000 entreprises ont fait faillite, soit le deuxième nombre le plus élevé jamais enregistré. Cette vague de faillites menacera 76 000 emplois en Belgique et fera grimper le taux de chômage à 8,5 % en 2021. Les données antérieures du Bureau du Plan tablaient sur une perte totale d’emplois de 82 000, ce qui montre un alignement entre les deux études.

La Banque des règlements internationaux (BRI) tire également la sonnette d’alarme. Elle a pour mission de surveiller l’évolution des marchés financiers. Le fait que les institutions financières aient accordé des prêts à grande échelle, avec l’approbation des banques centrales, est une bonne chose, selon la BRI. Mais la Banque souligne également le risque que, lorsque l’impact de toutes les créances douteuses en souffrance sera transféré aux banques, la situation se détériorera encore davantage. Cela aura un impact sur les bilans des banques.

La situation avec nos principaux partenaires commerciaux n’est pas moins grave : en France, les économistes s’attendent à 108 000 faillites, au Royaume-Uni à 53 000 et en Allemagne à 40 000.

En outre, les tensions entre les États-Unis et des pays comme la Chine et la Russie peuvent également jouer un rôle négatif sur la reprise du commerce international.

Tous ces éléments constituent la recette d’une crise de liquidité qui pourrait être pire que celle que nous avons connue lors de la crise financière de 2008.

Qu’est-ce que cela signifie pour le secteur financier ?

Toutes les entreprises devraient commencer à s’inquiéter de leurs factures impayées à ce jour. Pour les assureurs, il s’agit des polices d’assurance imp ayées à ce jour. En particulier, de nombreuses assurances d’entreprise ont un caractère évolutif et les avis d’échéance sont envoyés chaque année. Ces factures risquent de ne pas être payées. Le recouvrement de ces factures deviendra un élément important à superviser en 2021.

Un deuxième impact pour les assureurs concerne les polices dont la prime est calculée en fonction de paramètres tels que le chiffre d’affaires, le nombre d’employés, … La PRG de ces polices sera plus faible en 2021 car les deux lockdowns ont considérablement réduit le chiffre d’affaires et l’emploi pour de nombreuses entreprises.

Un troisième impact pour les assureurs, tout à fait évident, est que les assurances crédit verront plus de demandes d’indemnisation, étant donné le taux de défaillance plus élevé des fournisseurs. Les entreprises compteront sur leur assurance-crédit pour couvrir le non-paiement des lignes de crédit qui leur ont été accordées. En Belgique, il en va de même pour l’assurance faillite, qui garantit aux indépendants et aux entrepreneurs un revenu de remplacement après une faillite.

Pour les banques, il est évident que cette vague de faillites touchera en premier lieu les prêts aux entreprises et les prêts hypothécaires. Elles devront faire face à un plus grand nombre de radiations ainsi qu’à une augmentation des paiements d’intérêts en retard. En ce qui concerne les prêts hypothécaires aux entreprises, les banques bénéficient d’une garantie sur certains actifs, mais si davantage de biens immobiliers d’entreprise inondent le marché, les prix seront sous pression. À l’heure actuelle, les banques ont clairement tendance à consolider les prêts présentant un risque plus élevé dans le cadre des « prêts Covid » et à les séparer des prêts ordinaires et sains.

Le scénario de double creux économique aura également un impact sur les marchés de capitaux. Euler Hermes voit un risque de pentification des courbes de rendement des obligations d’État, mais craint davantage la surévaluation actuelle des actions américaines. Une correction des marchés boursiers américains entraînera également une baisse des actions européennes, étant donné la corrélation entre ces classes d’actifs. Enfin, la solvabilité des obligations d’entreprise à haut rendement sera mise à mal, ce qui entraînera probablement un élargissement de l’écart de crédit.

Une chose est sûre, 2021 promet d’être une année financièrement difficile pour les banques et les assureurs. Le gouvernement et les banques centrales devront prendre des mesures rapides pour éviter que l’économie ne soit à nouveau durement touchée.