L’approche centrée sur le client entraîne un changement de stratégie qui génère de multiples défis pour le secteur. Entretien avec Jo Cuyvers, directeur général de DynaFin, société de conseil en gestion active dans le Benelux.
En quoi un modèle omnichannel est-il essentiel pour offrir une expérience client optimale ?
Jo Cuyvers : « Selon notre enquête auprès des banques et des compagnies d’assurance, celles qui ont une présence à la fois physique et en ligne (« Bricks & Clicks ») offrent aux clients le meilleur des deux mondes. Mais celles qui distribuent des produits et services moins complexes, de type commodité (par exemple les banques de détail) sont plus susceptibles d’adopter principalement – ou même uniquement – une stratégie numérique d’abord. Au contraire, celles qui distribuent des produits et services plus complexes continuent de privilégier le contact physique avec les clients, avec l’appui d’outils numériques. Par conséquent, ils se concentreront plus probablement sur un modèle d’entreprise phygital (physique + numérique)… »
Dans un tel modèle, la relation de confiance avec le client est-elle donc cruciale ?
J.C. : « Elle joue un rôle central, si ce n’est le plus important. Elle est dans la nature même du modèle d’entreprise. Or, la digitalisation rend plus difficile l’établissement d’une relation de confiance. Le défi est donc d’accompagner l’activité de conseil par le numérique et de rendre les questions complexes accessibles et compréhensibles pour tous. Les clients doivent pouvoir compter sur l’infrastructure numérique d’une banque. L’approche omnicanale place le client au centre de ses préoccupations, en lui offrant un service personnalisé et une expérience utilisateur optimisée. Cela permet au client d’accéder facilement à l’information à partir de n’importe lequel de ces canaux, puisqu’ils sont connectés les uns aux autres… »
Et avec un service 24/7 ?
J.C. : « L’essor du service client virtuel s’explique par la nécessité de répondre rapidement aux demandes croissantes des clients sur plusieurs canaux et d’assurer la continuité de l’activité. Les solutions technologiques émergentes combinent des techniques d’intelligence artificielle, telles que l’apprentissage en profondeur et le traitement du langage naturel. Il en résulte des assistants numériques dotés de capacités de conversation plus avancées et d’une meilleure aptitude à comprendre le contexte du client. Ils permettent également d’inclure des infographies, une voix artificielle ou une situation émotionnelle. »
Le parcours client est donc repensé sur un modèle phygital ?
J.C. : « Le déploiement de la technologie numérique inclut les interactions humaines dans la construction de modèles relationnels déterminés. Les clients continuent de valoriser le contact de confiance avec leurs conseillers pour prendre des décisions à des moments clés de leur vie ou pour réaliser des opérations complexes de banque/assurance. Les métiers de la banque et de l’assurance évoluent donc d’un rôle administratif vers un rôle de conseil pour construire une relation client personnalisée.
Une stratégie de gestion omnicanale nécessite-t-elle la mise en place d’une infrastructure technique avec des capacités de données accrues ?
J.C. : » Pour réaliser le parcours client sur les différents canaux, y compris la possibilité de passer d’un canal à l’autre et l’interaction en temps réel, les différents systèmes informatiques des banques et des assurances doivent faciliter l’échange de données entre eux. Cela nécessite un niveau élevé d’intégration et de performance du système. L’utilisation intelligente des données vise à fournir de nouveaux services hautement personnalisés.
Ainsi, de nombreux produits bancaires et d’assurance sont fortement standardisés, mais les nouvelles technologies permettent une plus grande personnalisation, comme une vision holistique du client ou des produits et services adaptés aux besoins du client. Les algorithmes de l’intelligence artificielle permettent d’analyser des données à grande échelle et d’identifier de nouveaux modèles dans le cycle de vie du client. L’objectif des institutions financières est de créer des modèles prédictifs pour anticiper les besoins des clients en termes de produits et de services.
Dans ce contexte, une cybersécurité optimale est-elle plus que jamais indispensable ?
J.C. : « Il est essentiel que les banques puissent faire confiance aux applications impliquées dans une interaction. Elles doivent donc être à l’affût des programmes suspects tels que les malwares qui peuvent s’infiltrer dans un appareil à l’insu de l’utilisateur. Mais ce même utilisateur doit également utiliser ces outils de manière appropriée, en fonction du profil numérique que la banque a construit au fil du temps. Les moyens de renforcer la sécurité comprennent le contrôle de l’identité numérique via l’authentification multifactorielle, ou le filtrage intelligent des transactions basé sur des algorithmes capables d’identifier des schémas malveillants et d’analyser les transactions à un niveau holistique. Les stratégies de cloud ont également évolué dans le secteur, où la confiance dans la protection des données a augmenté parmi les fournisseurs, mais avec une limite fixée pour le stockage des données en Europe… »